Résumé : L’appréciation de la densité significative d’un espace au sens de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme est parfois délicate, en particulier lorsque la densité des constructions n’est pas homogène et que des terrains de taille importante situés au cœur de l’urbanisation ne sont pas bâtis. C’est à ce cas de figure que la Cour administrative d’appel de Marseille était confrontée. Elle juge que la présence d’un grand terrain demeuré à l’état naturel et d’un terrain de camping ne remettent pas en cause la qualification d’agglomération ou de village existant (CAA Marseille, 17 décembre 2021, Association de défense de l’environnement de Bormes et du Lavandou, n° 21MA00787).
Par un arrêté du 15 décembre 2019, le maire de la commune du Lavandou avait délivré un permis de construire à la SCICV Les Ecrin pour la constructions de 8 villas sur un terrain situé dans le quartier de la Fossette. Saisi par l’association de défense de l’environnement de Bormes et du Lavandou, le Tribunal administratif de Toulon avait partiellement annulé cette autorisation par un jugement du 15 décembre 2020. Insatisfaite de ce résultat, l’association avait alors saisi la Cour administrative d’appel de Marseille.
Le terrain d’assiette du projet bordés à l’est et à l’ouest par le chemin des Marguerites. Au sud, le terrain de camping cité par l’arrêt (vue aérienne Géoportail interactive)
Le principal moyen soulevé par la requérante est tiré de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme aux termes duquel l’extension de l’urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et les villages existants. Le Conseil d’État a rappelé « qu’il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c’est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d’autres, dans les zones d’urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages » (CE, 9 novembre 2015, n° 372531, Commune de Porto-Vecchio).
L’application de ce principe est parfois délicate. Le nombre de constructions requis pour être qualifié de « significatif » ne fait plus vraiment débat puisque la plupart des décisions retiennent le seuil d’une quarantaine de constructions. La question de la densité des constructions est en revanche plus délicate car elle se prête moins à une approche quantitative. L’appréciation des juges dépend alors du regroupement des constructions, de la présence de voies publiques ou de l’existence de parcelles non bâties.
Au cas présent, l’hésitation était possible car si le terrain d’assiette du projet jouxte une urbanisation importante, il est en séparé, au sud, par un terrain de grande taille occupé par un camping. Or, seules les constructions d’un camping soumises à autorisation et non le camping dans son ensemble peuvent être prises en compte pour apprécier la continuité avec une agglomération ou un village existant (CE, 11 juillet 2018, n° 410084, ministre de la Cohésion des territoires).
Pour la Cour administrative d’appel de Marseille, cette circonstance ne remet cependant pas en cause la qualification d’agglomération ou de village existant :
« Il ressort des pièces dossier que le terrain d’assiette du projet, situé au lieudit » La Fossette « , en plein cœur de la zone UD, est entouré de parcelles construites sur tous ses côtés, dans un secteur composé de maisons individuelles et d’immeubles collectifs, desservis par le chemin des Marguerites, l’avenue du capitaine Thorel et la route départementale. Le terrain d’assiette est situé dans une zone où l’urbanisation est constituée par une densité significative de constructions et non dans une zone d’urbanisation diffuse. Les circonstances que le terrain d’assiette, d’une superficie importante, est à l’état naturel, et qu’un important terrain au sud, supportant un camping, est moins densément construit, ne permettent pas de remettre en cause la densité significative de l’urbanisation du secteur. Le projet de construction de huit villas, situé au cœur de ce secteur, est réalisé en continuité de cette urbanisation et ne méconnait donc pas les dispositions de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme » (CAA Marseille, 17 décembre 2021, Association de défense de l’environnement de Bormes et du Lavandou, n° 21MA00787).
La décision rendue par la Cour administrative d’appel de Marseille fait une application classique des critères jurisprudentiels à une situation pour laquelle l’appréciation de la densité significative au sens de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme était délicate.