Le permis de construire modificatif est un outil précieux permettant d’ajuster un projet initial sans déposer une nouvelle demande complète. Il est toutefois encadré par certaines conditions, récemment assouplies, issues de la réglementation et de la jurisprudence.
Le permis modificatif, une solution simple pour ajuster un projet immobilier
Le permis de construire modificatif donne la possibilité au pétitionnaire de faire évoluer son projet en fonction des contraintes éventuelles rencontrées lors de la construction. Mais il constitue également un levier pour corriger certaines irrégularités qui entacheraient le permis de construire initial.
L’opportunité de faire évoluer un projet immobilier déjà autorisé
Il arrive souvent que le titulaire d’un permis de construire s’aperçoive en cours de chantier de la nécessité de faire évoluer son projet, par exemple pour s’adapter aux caractéristiques du sol ou parce que le raccordement aux réseaux tel qu’il était prévu au départ s’avère impossible techniquement. Les choix de matériaux sont également susceptibles d’évoluer en cours de route.
Dans ce cas, le permis modificatif présente l’intérêt d’autoriser les modifications souhaitées sans générer une trop grande complexité administrative. Parce qu’il leur fait gagner du temps et leur donne de la flexibilité, le permis modificatif apparaît comme un outil juridique particulièrement utile pour tous les porteurs de projet de construction, qu’il s’agisse des particuliers mais aussi des professionnels tels que les promoteurs immobiliers ou les bailleurs sociaux.
Le permis de construire modificatif comme mode de régularisation
Selon une jurisprudence constante, le permis de construire modificatif peut également être utilisé pour rectifier des illégalités identifiées dans le permis de construire initial. Cette possibilité (notamment confirmée par le Conseil d’État dans son arrêt du 2 février 2004, requête n°238315) se révèle avantageuse pour le pétitionnaire : il a ainsi le droit d’apporter des corrections à son projet pour le rendre conforme aux normes d’urbanisme applicables sans avoir solliciter un nouveau permis.
A titre d’exemples, sont régularisables des illégalités portant sur la conformité aux règles locales d’urbanisme (règles relatives à l’implantation, à la hauteur, à l’aspect extérieur des constructions…), ou encore des erreurs dans les plans, ainsi que des insuffisances dans le dossier de demande de permis de construire initial.
Les trois conditions nécessaires pour l’obtention d’un permis modificatif
Un permis de construire en cours de validité
L’article R.424-17 du Code de l’urbanisme prévoit que le permis de construire est valide pendant trois ans à compter de sa délivrance. Durant cette période, les travaux doivent débuter, sous peine de péremption de l’autorisation d’urbanisme. Si les travaux sont commencés, le délai est prolongé d’une durée équivalente au temps nécessaire pour achever les travaux, sous réserve que ceux-ci ne soient pas interrompus plus d’une année.
En clair :
- Si les travaux n’ont pas significativement commencé dans le délai de trois ans suivant la délivrance du permis, celui-ci devient caduc.
- Si les travaux ont commencé dans ce délai, même s’ils ont été interrompus, le permis reste valable. Cependant, si l’interruption des travaux dure plus d’un an après l’expiration de ce délai de trois ans, le permis deviens également caduc (Conseil d’État, 10 mai 2017, requête n°399405).
Par ailleurs, l’article R.424-31 du code de l’urbanisme permet de proroger la validité du permis à deux reprises, pour une durée d’un an, sur demande du pétitionnaire.
À noter : de manière constante la jurisprudence considère que :
- Le simple dépôt de la déclaration ouverture de chantier (DOC) ne constitue pas un démarrage significatif du chantier,
- Il en va de même des simples travaux préparatoires : pour interrompre le délai de caducité, les travaux qui sont entrepris doivent être « d’une importance significative » (Conseil d’État, 16 juin 2010, SARL Eolimistral, requête n°325304).
La vie d’un permis de construire peut donc être assez longue, ce qui ménage la possibilité de délivrer un permis de construire modificatif même plusieurs années après la délivrance du permis de construire initial :
Des travaux non achevés
Les modifications ne peuvent concerner que des projets encore en cours. L’article R.462-1 du Code de l’urbanisme impose une déclaration d’achèvement des travaux. Une fois cette déclaration effectuée, il est en principe impossible de déposer un permis modificatif.
À noter : une régularisation, par le biais d’un permis de construire modificatif, peut être imposée par le Juge administratif. En effet, dans le cadre d’un contentieux visant à contester un permis de construire devant les juridictions administratives, le juge administratif dispose de plusieurs outils pour permettre la régularisation de ce permis : le sursis à statuer (article L.600-5-1 du code de l’urbanisme) ou encore l’annulation partielle (article L.600-5 du même code). Ces deux articles précisent que régularisation est possible, « même après l’achèvement des travaux ».
Hormis cette hypothèse de régularisation décidée par le Juge administratif, la délivrance d’un permis de construire modificatif est subordonnée à l’absence d’achèvement des travaux.
Respect de la nature du projet initial
Selon le Conseil d’État, dans un récent et important arrêt du 26 juillet 2022 (requête n°437765), les modifications ne doivent pas bouleverser la nature du projet initial. Cet arrêt a marqué une nette évolution jurisprudentielle en assouplissant assez considérablement les critères antérieurs (les modifications devaient demeurer « non-substantielles », soit être assez mineures). Désormais, des modifications substantielles peuvent être acceptées si elles ne remettent pas en cause les fondements du projet initial, comme sa destination principe.
Par exemple, transformer un pavillon résidentiel de taille moyenne en immeuble commercial de 5 étages nécessite toujours un nouveau permis.
À noter : L’évolution de la jurisprudence étant récente, y a pour l’heure assez peu de décisions ayant précisé les modifications susceptibles de « bouleverser la nature même du projet initial ».
Que faire après la délivrance d’un permis modificatif ?
Comme tout permis, on l’affiche ! Cette obligation est bien souvent oubliée s’agissant des permis modificatifs.
Pourtant, le permis de construire modificatif s’affiche de la même manière que le permis de construire initial.
Lorsqu’un permis de construire est délivré, son affichage sur le terrain est obligatoire pour informer le public et permettre aux tiers d’exercer leur droit de recours. Cette obligation est prévue par l’article R. 424-15 du Code de l’urbanisme, qui impose l’installation d’un panneau visible depuis la voie publique, dès la notification de la décision ou dès qu’elle est tacitement acquise. Ce panneau doit rester en place pendant toute la durée des travaux.
Le contenu de ce panneau est strictement réglementé. Il doit indiquer :
- le nom du bénéficiaire ;
- la nature du projet ;
- la superficie du terrain ;
- l’adresse de la mairie où le dossier peut être consulté ;
- la date de délivrance et le numéro du permis ;
- les droits de recours des tiers.
Dans la pratique, on conseille d’implanter le panneau d’affichage du permis de construire modificatif à côté du permis initial, afin que les deux panneaux soient bien visibles.