Cette page est à jour le 14 mai 2020. Elle présente les dispositions de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 modifiée par les ordonnances n°2020-427 du 15 avril 2020, n°2020-539 du 7 mai 2020 et n°2020-560 du 13 mai 2020 prises dans le cadre de l’urgence sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19. Cette page est également à jour de la Loi n°2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions. Seules sont abordées dans cette page les dispositions qui concernent le code de l’urbanisme. Elle traite particulièrement de la possibilité de continuer à instruire les demandes pendant la période de suspension.

C’est inévitablement une des questions qui se pose à la lecture de l’ordonnance n°2020-306 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période : les services en charge de l’urbanisme qui travaillent dans des conditions difficiles, souvent à distance, avec un accès moins commode à des dossiers composés de nombreux plans, peuvent-il encore instruire des demandes ou doivent-ils attendre le report ou la suspension des délais organisés par le dispositif d’urgence ?

Un tel gel du fonctionnement des services n’est pas à l’ordre du jour. L’idée, tout au contraire, est d’éviter d’accumuler un trop grand retard dans le traitement des demandes. Aussi, lorsque les moyens humains et matériels le permettent, rien ne s’oppose à ce que l’instruction des dossiers se poursuive et que des décisions soient prises.

Les décisions liées à l’usage du sols qui ont été prises entre le 12 mars (date à laquelle a été fixée le début de l’état d’urgence sanitaire) et le 25 mars (date de l’ordonnance précisant les modalités de suspension des procédures d’instruction) ne sont pas remises en cause par la suspension des délais d’instruction. Leur validité n’est pas davantage affectée.

Parallèlement, la possibilité de déposer des demandes d’autorisations d’urbanisme n’est pas suspendue, ce qui permettra d’éviter un afflux massif de dossiers à l’issue de l’état de crise.

Les « Recommandations à l’attention des maires, des présidents de conseils départementaux, des présidents de conseils régionaux et des présidents d’établissements publics et de coopération intercommunale » adressées par le Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales précise d’ailleurs, dans une note en date du 21 mars 2020 relative à la « Continuité des services publics locaux dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire » disposent que :

« Les services d’urbanisme pourront voir leur activité réduite dès lors que le projet de loi d’urgence prévoit une suspension du délai légal de traitement des autorisations d’urbanisme. Ainsi, l’inactivité d’un service ne générera pas, au cours de cette période, une décision implicite de la commune ». 

Les services de l’urbanisme peuvent donc être fermés, mais cela demeure une simple faculté et ne présente aucun caractère obligatoire. Rien n’interdit donc à l’administration d’édicter des décisions expresses (arrêté de permis de construire, certificats d’urbanisme, etc.).

Un certain nombre de questions doivent toutefois être envisagées :

  • Comment procéder aux consultations éventuellement requises (ABF, CDNPS…) ? Pour les autorités dont l’avis est requis, il faut privilégier un envoi des dossiers par la voie dématérialisée. Certaines commissions pourraient envisager de délibérer de manière collégiale à distance. Ces demandes d’avis entrent dans le champ d’application du nouvel article 12 ter issu de l’ordonnance n°2020-427 du 15 avril 2020. Nous avons consacré un article à cette question.

  • Faut-il afficher les demandes en Mairie et les transmettre au contrôle de légalité ? La réponse est oui mais il faut avoir à l’esprit que ces mesures ne feront pas obstacle à la prorogation ou à la suspension des délai de recours (des tiers ou du Préfet). Ces derniers sont automatiquement reportés ou suspendus dans les conditions que nous expliquons dans cet article.

L’instruction des dossiers et la délivrance d’autorisations ou de non-oppositions (ou de refus et d’oppositions) entre le 12 mars et le 23 mai sont néanmoins adaptés :

  • Les délais d’instruction qui avaient commencé à courir avant le 12 mars sont suspendus et ne reprendront que le 24 mai à 0h00. Les délais qui n’avaient pas commencé à courir débuteront à cette date.
  • Les délais de recours sont de fait prorogés : ainsi, un pétitionnaire bénéficiant d’une autorisation d’urbanisme délivrée le 25 mars et l’affichant sur son terrain le jour même ne pourra se prévaloir d’un permis purgé de tout recours à l’issue d’un délai de deux mois, soit le 26 mai. Les délais de recours (tiers ou préfet) seront recevables, quelles que soient les formalités accomplies, jusqu’au 25 juillet 2020 (voir notre article consacré aux délais de recours).

L’administration, peut, dans les mêmes conditions, continuer à prendre des décisions en matière de droit de préemption.

Ainsi, délivrer une renonciation expresse à préempter pour une déclaration d’intention d’aliéner (DIA) reçue après le 12 mars ne semble pas faire peser un risque sur la vente ensuite réalisée. C’est uniquement si l’administration souhaite laisser naître une décision tacite qu’il faudra alors attendre la fin de la période d’état d’urgence.

L’ordonnance du 25 mars 2020 n’a donc pas pour but de paralyser le pouvoir décisionnaire de l’administration durant cette période. Elle permet, en revanche, de protéger l’administration en évitant la naissance de décisions tacites et en reportant les délais pour prendre certaines décisions.

https://lgp-avocats.fr/2020/04/09/limpact-de-letat-durgence-sanitaire-sur-les-autorisations-durbanisme-2-le-calcul-des-delais-de-lordonnance-n2020-306-du-25-mars-2020/
Share