Chronique de jurisprudence loi Littoral du mois de mars 2021

par | Jan 6, 2022 | Chroniques, Jurisprudence - Loi littoral, Loi littoral | 0 commentaires

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Résumé : le mois de mars 2021 permet à la Cour administrative d’appel de Marseille de préciser l’interprétation de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme tel qu’il est mis en oeuvre par le PADDUC. Le Blog a également relevé quelques décisions intéressantes relatives au principe de continuité avec les agglomérations et les villages existants et à la bande de cent mètres de l’article L. 121-16 du code de l’urbanisme.

Loi Littoral et PADDUC

Comme son prédécesseur, le schéma d’aménagement de la Corse, le PADDUC peut apporter des précisions sur la mise en œuvre de la loi Littoral. Dès lors que les dispositions adoptées à cette fin apportent suffisamment de précisions et qu’elles sont compatibles avec la loi Littoral, cette dernière doit être appliquée en fonction des précisions apportées.

Dans ce contexte, le PADDUC précise les dispositions de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme en expliquant qu’ « une agglomération est identifiée selon des critères tenant au caractère permanent du lieu de vie qu’il constitue, à l’importance et à la densité significative de l’espace considéré et à la fonction structurante qu’il joue à l’échelle de la micro-région ou de l’armature urbaine insulaire, et que, par ailleurs, un village est identifié selon des critères tenant à la trame et la morphologie urbaine, aux indices de vie sociale dans l’espace considéré et au caractère stratégique de celui-ci pour l’organisation et le développement de la commune ».

Application sur la commune de Sisco

Pour l’application de ce dispositif, la Cour administrative d’appel de Marseille juge qu’un projet qui se situe au nord-est du hameau Barrigioni, lequel ne répond pas aux caractéristiques de l’agglomération ou du village précisées par le PADDUC consiste ainsi à étendre l’urbanisation dans une zone qui n’est pas en continuité avec une agglomération ou un village existant (CAA de Marseille, 10 mars 2021, n° 19MA00553).

La parcelle n° 570, au nord est du hameau de Barrigioni sur la commune de Sisco (carte géoportail interactive)

Application sur la commune de Coti-Chiavari

Toujours pour l’application des dispositions de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme précisées par le PADDUC, la Cour administrative d’appel de Marseille juge que le lotissement « A Colombara » ne constitue pas une agglomération ou un village. Celui-ci ne présente notamment pas d’espace public urbain, d’indice de vie sociale ou de caractère stratégique pour l’organisation et le développement de la commune (CAA Marseille, 5ème chambre, 10 mars 2021, n° 19MA00904).

La parcelle H 681, au lieu dit Castagna, sur la commune de Coti-Chiavari (carte géoportail interactive)

Application sur la commune de Calvi

C’est encore à propos de ces dispositions que la Cour administrative d’appel de Marseille juge les parcelles F n°233, 264 et 265 qui se situent le long de la route d’accès à l’aéroport de Calvi jouxtent des constructions à usage industriel et quelques habitations dont le nombre nombre et la densité sont peu significatifs. Il s’ensuit que ces parcelles ne sont pas situées en continuité d’une agglomération ou d’un village existant alors même qu’elles seraient desservies par les réseaux et que le secteur de l’aéroport serait identifié comme une « tache urbaine » sur la cartographie du plan d’aménagement et de développement durable de la Corse (CAA Marseille, 5ème chambre, 10 mars 2021, n°19MA02279).

Les parcelles F 233, 264, 265 sur la commune de Calvi (carte géoportail interactive)

Application sur la commune de Zonza

Enfin, la Cour administrative d’appel de Marseille juge la parcelle AH n°0053 est entourée, au nord et à l’ouest, de plusieurs villas et, à l’est, d’un lotissement. Toutefois, cette zone ne présente ni espace public urbain, ni indice de vie sociale ou de caractère stratégique pour l’organisation et le développement de la commune. Elle n’est donc pas en continuité d’une agglomération ou d’un village au sens du PADDUC (CAA Marseille, 22 mars 2021, n°19MA05615).

Les parcelles AH 53, 54, 55, 56, au lieu dit Petraggione, sur la commune de Zonza (carte géoportail interactive)

Agglomérations et villages existants – application à un parc photovoltaïque

Conformément à une jurisprudence constante (CE, 28 juillet 2017, n° 397783, EARL Clos B), la Cour administrative d’appel de Marseille rappelle que les parcs photovoltaïques sont soumis au principe de continuité avec les agglomérations et les villages existants de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme (CAA de Marseille, 09/03/2021, 19MA00002). Le Blog loi Littoral avait analysé cette décision.

La loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets adoptée par l’Assemblée nationale le 20 juillet 2021, avait introduit une dérogation pour les parcs photovoltaïques. Elle était restrictive puisqu’elle n’était applicable que dans les friches désignées par décret. Cet article a toutefois été censuré par le Conseil Constitutionnel au motif qu’il était sans lien avec le projet de loi initial (Décision n° 2021-825 DC du 13 août 2021).

Agglomérations et villages existants – notion

Le lieu-dit  » Kerroch « , comporte une trentaine de constructions diffuses, réparties le long d’une même voie de circulation. Il est entouré de parcelles non bâties, ainsi que de vastes espaces naturels et agricoles, et se situe à environ 4 kilomètres au sud-ouest du centre-bourg de la commune de Moëlan-sur-Mer. Il ne constitue donc pas une agglomération ou un village existant (CAA de Nantes, 31 mars 2021, n°19NT04719).

Le lieu-dit Kerroch, commune de Moëlan-sur-mer (carte géoportail interactive)

Sans grande surprise, la Cour administrative d’appel de Bordeaux juge que le lieu-dit Lilian-Ouest qui comporte moins d’une dizaine de construction, et qui est distant de plus de deux kilomètres du centre-bourg de Soulac-sur-Mer, de trois kilomètres du lieu-dit de l’Amélie et de trois cents mètres de celui du Lilhan n’est ni une agglomération, ni un village. La circonstance que la commune a engagé de lourds investissements afin d’équiper le secteur en réseaux de voirie, d’éclairage public et d’assainissement des eaux usées et pluviales ou qu’elle a, par le passé, délivré des autorisations d’urbanisme pour des projets situés sur des parcelles mitoyennes au terrain d’assiette de la division projetée est sans incidence sur cette qualification (CAA Bordeaux, 9 mars 2021, n° 19BX02723).

lieu dit Lilian-Ouest, commune de Soulac-Sur-Mer.

Bande de cent mètres – notion d’espace urbanisé

Le Conseil d’État a rappelé que ne peuvent déroger à l’interdiction de toute construction sur la bande littorale des cent mètres que les projets réalisés dans des espaces urbanisés, caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions, à la condition qu’ils n’entraînent pas une densification significative de ces espaces (CE, 21 juin 2018, n° 416564). Pour l’application de ce principe, la Cour administrative d’appel de Nantes juge qu’un espace séparé du rivage de la mer, au sud, par une route et un parc de stationnement bitumé et entouré, à l’ouest, par une place publique et un complexe aquatique et nautique, au nord par un autre parc de stationnement bitumé et à l’est par des parcelles construites situées en continuité directe de l’agglomération est un espace urbanisé (CAA Nantes, 31 mars 2021, 20NT00375).

Les parcelles AV 119, 121 et 305 situées 1 boulevard Léopold Maissin, sur la commune du Relecq-Kerhuon

Bande de cent mètres – aménagements autorisés en dehors des espaces urbanisés

Aux termes de l’article L. 121-16 du code de l’urbanisme :  » En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d’eau intérieurs ignés au 1° de l’article L. 321-2 du code de l’environnement ». Le Conseil d’Etat a jugé qu’en dehors des espaces urbanisés, ces dispositions n’ont pas pour objet d’interdire tout aménagement ou réfection des constructions ou installations déjà existantes (CE, 22 juin 2012, n° 331051, Association Languedoc-Roussillon nature environnement).

Conformément à ce principe, la Cour administrative d’appel de Marseille juge que le règlement du PLU de la commune de Salses-le-Château peut autoriser la réfection ou la « réhabilitation » des cabanes existantes, à l’exclusion de toute construction nouvelle et de toute extension de ces constructions, au sein de la bande de 100 m de l’étang de Salses (CAA de Marseille, 9 mars 2021, n° 19MA00601)

Le village des Pêcheurs au lieu-dit La Roquette, Commune de Salses Le Château

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