Chronique de jurisprudence loi Littoral des mois de juillet et août 2022

par | Sep 14, 2022 | Chroniques, Jurisprudence, Loi littoral | 0 commentaires

Partager  :

Résumé : la chronique de jurisprudence loi Littoral de l’été 2022 fait la part belle au principe de continuité avec les agglomérations et les villages existants de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme. Au programme également quelques décisions sur l’extension de l’urbanisation dans espaces proches du rivage et sur la bande de cent mètres.

Agglomération, village et secteur déjà urbanisé

Notion d’agglomération et de village – Pour l’application de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, la Cour administrative d’appel de Bordeaux juge qu’un secteur où ne sont implantées qu’un nombre limité de maisons à usage d’habitation éloignées les unes des autres et séparées par des parcelles non bâties est une zone d’urbanisation diffuse. La Cour relève par ailleurs que ce secteur n’est pas au nombre des agglomérations et des villages identifiés par le SCOT de la Pointe du Médoc (CAA Bordeaux, 5 juillet 2022, n° 20BX02374).

Les parcelles n° E 1436 et 1438 sur la commune de Grayan-et-l’Hôpital (carte interactive Geoportail)

Rejet de la requête contre le PLU d’Hermanville-sur-Mer

Par une délibération du 30 janvier 2020, le conseil communautaire de la communauté de communes de Caen-la-mer a approuvé le PLU de la commune d’Hermanville-sur-Mer. Saisie en appel, la Cour administrative d’appel de Nantes devait se prononcer sur la légalité de deux zones d’urbanisation futures classées 1AUe et 1AUm (CAA Nantes, 22 juillet 2022, n° 21NT02536).

La légalité de la zone 1AUe ne posait pas de difficulté. La Cour se contente d’ailleurs d’affirmer qu’elle se situe en continuité d’une zone urbanisée de la commune caractérisée par un nombre et une densité significatifs de constructions.

La zone 1AUe située au sud de la RD 514

La compatibilité de la zone 1AUm avec les dispositions de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme était un peu plus délicate à apprécier car elle est séparée de l’agglomération d’Hermanville-sur-Mer par la RD 35. La zone 1AUm est elle même à cheval sur la RD 60 et c’est d’ailleurs la partie située à l’ouest de cette zone qui était contestée. Le Blog avait fait une synthèse de la jurisprudence sur la question de l’appréciation de la continuité en présence de routes.

La zone 1AUm située au sud de la RD 35

Pour la Cour, la zone classée 1AUm se trouve en continuité avec la zone urbanisée existante située de part et d’autre de la route départementale n° 35, laquelle ne constitue pas à cet endroit une rupture d’urbanisation.

Illégalité partielle du PLUI du territoire d’Avranches-Mont-Saint-Michel

La Cour administrative d’appel de Nantes était saisie d’un déféré préfectoral dirigé contre la délibération approuvant le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) du territoire d’Avranches-Mont-Saint-Michel. En première instance, le Tribunal administratif de Caen avait annulé le PLUI pour méconnaissance des obligations de consommation économe de l’espace du code de l’urbanisme. La Cour ne va pas aussi loin mais elle juge toutefois que certaines dispositions du PLUI sont illégales au regard, notamment, de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme. Les illégalités pouvant être régularisées par une modification du PLUI, la Cour administrative d’appel de Nantes décide de surseoir à statuer pendant un délai de 10 mois (CAA Nantes, 22 juillet 2022, n° 21NT02275, Communauté d’agglomération Mont-saint-Michel- Normandie). Les secteurs en cause sont les suivants :

Zones d’activités économiques de Val-Saint-Pair et de Marcey-les-Grèves – La jurisprudence admet que les zones d’activité économiques peuvent être qualifiées d’agglomération ou de village existant ce qui est la condition pour que de nouveaux bâtiments soient construits. L’appréciation du juge ne dépend pas uniquement du nombre de constructions et de leur densité, les surfaces occupées sont également prises en compte comme l’avait rappelé la Cour administrative d’appel de Nantes. La même Cour avait jugé qu’un espace comportant une vingtaine de bâtiments et d’importantes surfaces de stockage et de stationnement répartis sur environ 20 hectares constituait une agglomération (CAA Nantes, 25 février 2022, n° 20NT00038, Société Orange). Il n’est en revanche pas possible de créer une zone d’activité nouvelle. Cela avait été rappelé par la Cour administrative d’appel de Marseille à propos du SCOT Var Estérel.

Les zones d’activités économiques de faible dimension ne peuvent pas non plus être qualifiées d’agglomération ou de village existant. La Cour administrative d’appel de Nantes juge donc que la création de zones UZ à dominante d’activités économiques sur les communes de Val-Saint-Pair et de Marcey-les-Grèves ne respecte pas l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme. La Cour relève que la première zone ne comporte qu’une quinzaine de constructions et la seconde une dizaine.

Extrait du PLUI commune de Marcey-les-Grèves et image géoportail

Hameau nouveau intégré à l’environnement de Beauvoir – La loi ELAN du 28 novembre 2018 a supprimé la notion de hameau nouveau intégré à l’environnement comme alternative à l’extension de l’urbanisation en continuité avec les agglomérations et villages existants. Elle avait toutefois prévu des dispositions transitoires. L’article 42 de la loi dispose ainsi que la suppression des hameaux nouveaux intégrés à l’environnement ne s’applique pas aux « demandes d’autorisation d’urbanisme déposées avant le 31 décembre 2021 ni aux révisions, mises en compatibilité ou modifications de documents d’urbanisme approuvées avant cette date ».

Dans ce cadre, le PLUI avait créé une zone 2AUm au lieu-dit la Caserne, sur la commune de Beauvoir. Ce hameau était prévu par le SCOT du Pays de la Baie du Mont-Saint-michel.

Zone 2AUm sous forme de hameau nouveau intégré à l’environnement de la commune de Beauvoir

La Cour administrative d’appel de Nantes juge toutefois que ces règles transitoires ne sont pas applicables au PLUI du territoire d’Avranches-Mont-Saint-Michel qui ne résulte pas de la révision ou de la modification d’un document d’urbanisme existant. Le territoire couvert par le PLUI était en effet auparavant couvert par plusieurs documents d’urbanisme communaux. La Cour relève par ailleurs que le secteur de la caserne qui ne comporte qu’une quinzaine de bâtiments ne peut pas être qualifié d’agglomération ou de village existant.

Parc de stationnement et constructions nécessaires aux équipements collectifs sur la commune de Genêts – Le PLUI avait créé un secteur Ne destiné au stationnement des véhicules pour les départs de traversée de la baie du Mont-Saint-Michel. Le règlement de la zone permettait les constructions ou installations nécessaires à des équipements d’intérêt collectif. Pour la Cour, cette zone est illégale car elle n’autorise pas que l’extension des constructions existantes. Le fait qu’elle soit de faible superficie et qu’elle soit à vocation de stationnement sont sans incidence.

La zone Ne de la commune de Genet (extrait du PLUI et photographie aérienne Géoportail)

Notion d’agglomération et secteur déjà urbanisé sur la commune de Poilley – En juillet 2020, la Cour administrative d’appel de Nantes avait jugé qu’un espace qui comporte une vingtaine d’habitations et une dizaine de bâtiments à vocation artisanale et commerciale ne peut recevoir la qualification d’agglomération ou de village. Un permis d’aménager un lotissement de 35 lots était donc contraire à l’article L.121-8 du code de l’urbanisme (CAA Nantes, 17 juillet 2020, n° 19NT04244, Commune de Poilley). Le Blog avait rapporté cette décision dans la chronique de juillet août 2020.

La zone UH sur la commune de Poilley

Dans le cadre de l’instance dirigée contre le PLUI, le Tribunal administratif de Caen avait annulé la zone UH sur ce même secteur. La Cour administrative d’appel de Nantes relève pour sa part que la zone Uh de Poilley, qui n’est pas identifiée comme un village ou une agglomération dans le SCOT, comprend une trentaine de maisons, disposées en arc autour d’une zone d’activité qui la jouxte à l’ouest, laquelle est également en continuité d’une petite zone pavillonnaire. L’ensemble est structuré autour de deux routes et comporte au surplus un restaurant et une carrosserie. Ainsi, alors même que la zone Uh litigieuse, s’ouvre au nord, à l’est et au sud sur des parcelles non construites et se situe à 1,5 km du bourg de Poilley, elle doit être regardée comme se situant dans un secteur déjà urbanisé.

Espaces proches du rivage

Notion d’extension de l’urbanisation et extension limitée – La Cour administrative d’appel de Nantes (CAA Nantes, 5 juillet 2022, n° 20NT03435) juge qu’un projet de lotissement de 42 logements entraîne une extension de l’urbanisation au sens de la jurisprudence « Soleil d’or » dans la mesure où l’urbanisation existante est renforcée de manière significative. La Cour juge toutefois que cette extension présente un caractère limité compte tenu des dispositions du SCOT. Le Blog a commenté cette décision.

Bande de cent mètres

Notion d’espace urbanisé – La Cour administrative d’appel de Marseille juge que la nouvelle base nautique de Carnon sur la commune de Mauguio se situe dans un espace urbanisé de la bande de cent mètres (CAA Marseille, 7 juillet 2022, Commune de Maugio, req. n° 20MA00223). Cet arrêt est commenté et illustré dans cet article du Blog loi Littoral.

Retrouvez toutes les chroniques de jurisprudence du Blog loi Littoral

Share

À PROPOS

Présent à Brest et à Paris, le cabinet d’avocats LGP conseille collectivités, professionnels et particuliers en droit public et en droit de l’urbanisme. Plus de 30 années de pratique nous ont permis d’avoir une expertise sur la loi Littoral. Ce blog nous permet de partager nos connaissances et notre passion pour cette matière.

SUIVEZ NOUS

NOTRE  BLOG SUR LE  DROIT DE L’URBANISME

NOTRE  BLOG COMMANDE  PUBLIQUE ET URGENCE SANITAIRE

NOS DERNIÈRES PUBLICATIONS