Cette page est à jour le 14 mai 2020. Elle traite de l’application de l’ordonnance 2020-306 (modifiée par les ordonnances n°2020-427 du 15 avril 2020, n°2020-539 du 7 mai 2020 et n°2020-560 du 13 mai 2020) à la question de la naissance des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des décisions de non-oppositions à déclaration tacites à l’issue des délais d’instruction. Cette fiche est à jour de la Loi n°2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Texte de référence :

Article 12 ter de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020

Les délais d’instruction des demandes d’autorisation et de certificats d’urbanisme et des déclarations préalables prévus par le livre IV du code de l’urbanisme, y compris les délais impartis à l’administration pour vérifier le caractère complet d’un dossier ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction, ainsi que les procédures de récolement prévues à l’article L.462-2 du même code, qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus. Ils reprennent leur cours à compter du 24 mai 2020.

Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 est reporté à l’achèvement de celle-ci.

Les mêmes règles s’appliquent aux délais impartis aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, aux services, autorités ou commissions, pour émettre un avis ou donner un accord dans le cadre de l’instruction d’une demande ou d’une déclaration mentionnée à l’alinéa précédent ainsi qu’au délai dans lequel une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou une autorisation d’urbanisme tacite ou explicite peut être retirée, en application de l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme.

Les dispositions du présent article s’appliquent également aux demandes d’autorisation de division prévues par le livre Ier du code de la construction et de l’habitation ainsi qu’aux demandes d’autorisation d’ouverture, de réouverture, d’occupation et de travaux concernant des établissements recevant du public et des immeubles de moyenne ou de grande hauteur prévues par le même livre, lorsque ces opérations ou travaux ne requièrent pas d’autorisation d’urbanisme.

Jusqu’à l’intervention de l’ordonnance du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de Covid-19, c’est l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020 qui avait vocation à s’appliquer aux délais d’instruction et demandes de pièces complémentaires en matière d’urbanisme.

Cet article 7 prévoit que les délais d’instruction qui n’ont pas expiré avant le 12 mars sont suspendus jusqu’au 23 juin minuit (période définie à l’article 1 de l’ordonnance du 25 mars). C’est donc à partir de cette date que pouvait être calculé les délais d’instruction aux termes desquels des décisions tacites sont susceptibles de naître.

Les délais d’instruction sont aujourd’hui régis de manière spécifique par l’article 12 ter de l’ordonnance du 25 mars modifiée.

Le dispositif issu de l’ordonnance du 15 avril est plus clair. Il reprend la logique que posait l’article 7 de l’ordonnance mais les délais sont raccourcis.

Le principe de suspension des délais d’instruction est donc confirmé par l’article 12 ter de l’ordonnance du 25 mars (créé par l’ordonnance du 15 avril) : les délais d’instruction des demandes de permis n’ayant pas expiré avant le 12 mars sont suspendus. Ces délais reprennent leur cours à compter du 24 mai à 0h00.

De même, les délais d’instruction qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et le 23 mai minuit sont déclenchés à compter du 24 mai 0h00.

Cette suspension de délai s’applique également aux délais impartis aux collectivités pour vérifier le caractère complet d’un dossier et solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis (voir notre article sur les demandes de pièces complémentaires). Elle s’applique aussi au délai dans lequel une prorogation de délai doit être notifiée.

L’un des principaux soucis des services de l’urbanisme en période de crise est que la situation du service ne permette pas le traitement des dossiers en temps utile avec comme conséquence, au terme du délai d’instruction, la naissance d’un permis de construire tacite. Le risque est plus grand encore pour les déclarations préalables dont le délai d’instruction de droit commun n’est que d’un mois.

L’article 12 ter de l’ordonnance est à cet égard particulièrement protecteur de l’administration puisqu’il bloque, par principe, la naissance de décisions tacites.

Plusieurs cas de figure sont envisageables :

  • Si le délai d’instruction avait expiré avant le 12 mars, une décision tacite a pu naître et l’ordonnance 2020-306 modifiée n’y change rien ;

  • Si le délai d’instruction a commencé à courir avant le 12 mars et devait s’achever avant le 24 mai, il est suspendu et la durée qui reste à courir est reportée à compter du 24 mai 0h00 ;

  • Si le délai d’instruction a commencé à courir avant le 12 mars et qu’il doit s’achever après le 23 mai, il est prolongé de la durée écoulée entre le 12 mars et le 23 mai ;

  • Si le délai d’instruction devait débuter entre le 12 mars et le 23 mai, son point de départ est d’office reporté au 24 mai 0h00.

Il faut donc retenir deux points essentiels : 

  • En pratique, aucune « décision, accord ou avis » ne peut naître implicitement entre le 12 mars et le 23 mai 2020. 
  • Attention : « suspension » signifie que le délai reprend à l’issue de l’échéance évoquée (délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire) déduction faite du délai déjà écoulé avant le 12 mars 2020.

Exemple 1 : demande de permis déposée avant la période couverte par l’état d’urgence

Une demande de permis de construire une maison individuelle a été déposée le 11 février 2020. En l’absence de réponse de l’administration, un permis tacite devait en principe naître à l’issue du délai d’instruction (en général deux mois), soit le 11 avril 2020 (voir en ce sens : CAA Bordeaux, 15 novembre 2012, Ministre de l’écologie, requête n°11BX03114).

En application de l’article 12 ter de l’ordonnance, le délai d’instruction est suspendu. Le délai à l’issue duquel un permis tacite pourra naître recommencera à courir le 24 mai 0h00. Entre le 11 février et le 11 mars (dernier jour avant la période couverte par l’ordonnance), un mois s’est écoulé. Le délai d’instruction restant (un mois) recommence le 24 mai : un permis tacite est donc susceptible de naître le 23 juin.

Exemple 2 : demande de permis déposée pendant la période couverte par l’état d’urgence

Une demande de permis de construire une maison individuelle est déposée en Mairie le 22 mars 2020. En l’absence de réponse de l’administration, un permis tacite devait en principe naître à l’issue du délai d’instruction (en général : deux mois), soit le 22 mai 2020.

En application de l’article 12 ter de l’ordonnance, et sauf décision expresse de l’administration, le délai d’instruction est reporté et commencera à courir le 24 mai 0h00. Un permis tacite va donc naître le 23 juillet 2020.

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Loïc Prieur urbanisme Loïg Gourvennec urbanisme Pauline Riou urbanisme

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