Article L.121-8 du code de l’urbanisme : qu’est-ce qu’une agglomération ou un village ?

par | Fév 12, 2021 | Jurisprudence - Loi littoral, Loi littoral | 0 commentaires

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Résumé : appliquant les principes dégagés par le Conseil d’Etat dans l’arrêt « commune de Porto-Vecchio », la Cour administrative d’appel de Nantes juge qu’un secteur qui comporte plus d’une quarantaine de constructions de part et d’autre d’une route départementale constitue une agglomération ou un village au sens de l’article L.121-8 du code de l’urbanisme (CAA Nantes, 9 février 2021, n° 20NT00378, Commune de Lancieux).

Par un arrêté du 15 novembre 2016, le maire de Lancieux, dans le département des Côtes d’Armor avait délivré un certificat d’urbanisme déclarant irréalisable le projet de division d’une parcelle en vue de la création d’un lot à bâtir. Pour le maire, le lieu-dit Bodard ne pouvait être qualifié d’agglomération ou de village au sens de l’article L.121-8 du code de l’urbanisme. Saisi par la pétitionnaire, le Tribunal administratif de Rennes avait annulé cette décision. La commune de Lancieux avait alors fait appel.

La parcelle n° AL 15, située rue du Moulin, sur la commune de Lancieux

(carte geoportail interactive)

L’article L.121-8 du code de l’urbanisme dispose que l’extension de l’urbanisation doit se réaliser en continuité avec les agglomérations et les villages existants. Le Conseil d’État a rappelé « qu’il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c’est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d’autres, dans les zones d’urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages » (CE, 9 novembre 2015, n° 372531, Commune de Porto-Vecchio).

Si le principe est clair, son application concrète est souvent délicate. Le nombre de constructions requis pour être qualifié de « significatif » ne fait plus vraiment débat : la plupart des décisions retiennent le seuil d’une quarantaine de constructions. Le blog avait récemment fait état de la jurisprudence en la matière à propos d’un arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Bordeaux. La question de la densité des constructions est en revanche plus délicate car elle se prête moins à une approche quantitative. L’appréciation des juges dépend alors du regroupement des constructions, de la présence de voies publiques ou de l’existence de parcelles non bâties.

Au cas présent, le lieu-dit Bodard atteint certes le seuil minimum d’une quarantaine de constructions mais il est coupé en deux par une route départementale. A l’est, les constructions sont groupées mais, à l’ouest, là où se situe le terrain d’assiette du projet, il n’y a que 13 constructions édifiées de manière plus aérée.

La Cour n’y voit pour autant pas un obstacle, elle juge que « la parcelle cadastrée à la section AL sous le n° 15, objet du certificat d’urbanisme litigieux, propriété de Mme D…, est située au lieu-dit  » Bodard « , au sein d’un secteur qui comporte, de part et d’autre de la route départementale 786, dite rue du Moulin, dans sa partie nord, plus d’une quarantaine de constructions implantées de manière organisée le long des voies publiques, notamment la rue de la digue aux Moines qui borde la parcelle en cause, laquelle, en outre, est entourée, sur plusieurs de ses côtés, de parcelles construites. Ce secteur constitue donc une zone urbanisée caractérisée par un nombre et une densité significatifs de constructions » (CAA Nantes, 9 février 2021, n° 20NT00378, Commune de Lancieux).

Les critères mis en œuvre par l’arrêt de la Cour d’appel administrative de Nantes sont classiques. La solution retenue n’allait cependant pas de soi compte tenu de la présence de la route départementale et on peut comprendre la logique de prudence du maire de Lancieux. Il faut souhaiter que le rôle clé dévolu au SCOT par la loi et la jurisprudence permette, à l’avenir, de réduire l’incertitude récurrente lors de la mise en œuvre de l’article L 121-8.

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