La destination de l’emplacement réservé inscrite au sein d’un PLU a une importance capitale : un projet dont l’objet n’en serait pas conforme ne peut être réalisé. A défaut, aucune autorisation d’urbanisme n’est accordée pour un projet non conforme.

1. Rappel du droit : en dehors des constructions précaires seuls les projets conformes à la destination d’un emplacement réservé sont admis

L’article L.151-41 du code de l’urbanisme permet aux collectivités d’instituer des emplacements réservés sur des terrains. Les emplacements réservés sont frappés d’inconstructibilité. 

En dehors des constructions conformes à la destination de l’emplacement réservé, seules les constructions présentant un caractère précaire peuvent être légalement autorisées sur un emplacement réservé, avec l’accord de la collectivité intéressée à l’opération (Conseil d’État, 16 mai 2011, requête n°324967). 

L’autorité administrative chargée de délivrer le permis de construire est tenue de refuser toute demande, même émanant de la personne bénéficiaire de la réserve, dont l’objet ne serait pas conforme à cette destination, tant qu’aucune modification du plan d’occupation des sols emportant changement de la destination n’est intervenue.

2. Les projets conformes

Ainsi, le juge valide un permis de construire délivré pour un projet de construction empiétant sur une partie d’emplacement réservé « devenue inutile compte tenu de l’entier achèvement des travaux de constructions d’une voie nouvelle » (Cour administrative d’appel de Bordeaux, 12 février 2007, Madame Chadefaux). 

En outre, une sortie de véhicules depuis un garage souterrain peut être envisagée également sur un emplacement réservé dès lors qu’il ne ressort pas des pièces du dossier qu’elle serait incompatible avec la destination piétonnière du chemin en cause (Cour administrative d’appel de Lyon, 23 février 2016, requête n°14LY01127).  

Le Conseil d’État est également venu préciser :

« 3. (…) qu’en revanche, un permis de construire portant à la fois sur l’opération en vue de laquelle l’emplacement a été réservé et sur un autre projet peut être légalement délivré, dès lors que ce dernier projet est compatible avec la destination assignée à l’emplacement réservé ; »

cONSEIL D’eTAT, 20 JUIN 2016, REQUÊTE N°386978

Focus sur l’arrêt précité :

  • Le Conseil d’État valide un permis de construire portant à la fois sur l’opération pour laquelle l’emplacement a été réservé et sur un autre projet ;
  • Dans ce cas précis, le juge administratif apprécie alors la compatibilité entre le projet complémentaire et l’équipement ayant justifié l’emplacement réservé, alors que, dans le respect de la jurisprudence relative aux emplacements réservés, l’équipement à réaliser reste lui soumis à un rapport de stricte conformité avec la destination assignée à l’emplacement réservé.

3. Les projets non conformes

A l’inverse, n’est pas admis un permis de construire qui prévoit la réalisation de trente-six nouvelles places de stationnement dont onze sont situées sur la parcelle composant dans son intégralité l’emplacement réservé n°26 au bénéfice de la Métropole d’Aix-Marseille-Provence dès lors que la réalisation du chemin de la PAGERIE sur l’emprise envisagée priverait la clinique et le futur EHPAD d’une partie de leur stationnement et que la création des places de parking n’est pas conforme à la destination de l’emplacement réservé (Cour administrative d’appel de Marseille, 30 septembre 2021, requête n°20MA01341).

Le juge administratif considère la réalisation de places de stationnement non conformes à la destination assignée à un emplacement réservé destiné à l’aménagement paysager (Cour administrative d’appel de Lyon, 8 mars 2016, requête n°15LY00467)

Focus sur l’arrêt précité : 

  • Le raisonnement du Rapporteur public dans ses conclusions sous cet arrêt sont particulièrement éclairantes car le rapporteur public distingue le projet public et d’intérêt général porté par la commune et le projet privé de la société adverse : « Il ne saurait y avoir de confusion juridique entre le projet public et    d’intérêt général porté par la Commune de Sallanches et inscrit dans son règlement d’urbanisme et le projet commercial privé porté par la SCI Toastine, ces deux projets étant sous-tendus par des objectifs très différents. » (Conclusions du rapporteur public, Jean-Paul VALLECHIA sous l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon, 8 mars 2016, requête n°15LY00467)

Le maire est tenu de refuser un permis de construire pour un mur de soutènement qui empiète de manière transversale sur l’emplacement réservé destiné à l’aménagement paysager des abords d’un chemin puisqu’il n’est pas conforme à la destination assignée de l’emplacement réservé en cause (Cour administrative d’appel de Marseille, 11 décembre 2015, requête n°14MA01530).

Pour conclure, la destination de l’emplacement réservé inscrite au sein du document d’urbanisme a donc une réelle importance.  Un projet dont l’objet ne serait pas conforme ne peut être réalisé tant qu’une évolution du PLU modifiant la destination n’est pas intervenue.

Share