Chronique de jurisprudence loi Littoral du mois de mars 2024

par | Mai 16, 2024 | Chronique Jurisprudence, Jurisprudence - Loi littoral, Loi littoral, Publication | 0 commentaires

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Résumé : la chronique de jurisprudence loi Littoral du mois de mars 2024 comporte plusieurs décisions sur le principe de continuité avec les agglomérations et les villages existants mais également sur les espaces proches du rivage et la notion d’extension limitée de l’urbanisation. A noter, en particulier, l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes qui statue après cassation par le Conseil d’Etat sur la qualification du secteur de Kerpape sur la commune de Ploemeur. Merci à Manon et Maxence, élèves de première au Lycée Charles de Foucauld à Brest et à Lomig, élève de troisième au collège Diwan au Relecq-Kerhuon, de m’avoir aidé à préparer cette chronique.

Loi Littoral et SCOT

Conformité d’une autorisation à la loi Littoral – prise en compte du SCOT – Par un arrêté du 8 février 2019, le maire de Ploemeur avait délivré un permis d’aménager un lotissement au lieu-dit Kerpape. L’association Tarz-Héol et des particuliers avaient demandé au tribunal administratif de Rennes d’annuler cette décision. Leur requête ayant été rejetée, ils avaient saisi la cour administrative d’appel de Nantes. Celle-ci avait alors annulé le permis d’aménager en retenant le moyen tiré du défaut de continuité avec l’agglomération.  La cour avait considéré que le secteur de Kerpape ne comportait pas un nombre et une densité significatifs de constructions. Elle avait également retenu le moyen tiré du caractère non limité de l’extension de l’urbanisation (CAA Nantes, 20 juillet 2021, n° 20NT01323). 

Les parcelles ED 76 et 77 au lieu-dit Kerpape sur la commune de Plomeur (photographie interactive Géoportail)

En cassation, le Conseil d’Etat avait annulé cet arrêt sanctionnant une erreur de droit de la cour administrative d’appel. La commune de Ploemeur est en effet couverte par le SCOT du Pays de Lorient. Or la jurisprudence a rappelé que dès lors qu’un SCOT comporte des dispositions à la fois précises et compatibles avec la loi Littoral, il doit être pris en compte pour apprécier la conformité d’une autorisation avec les articles L. 121-1 et suivants du code de l’urbanisme. Le SCOT ne fait pas écran au sens où seules ses dispositions seraient applicables, il s’agit plutôt d’appliquer en même temps les dispositions de la loi Littoral et les dispositions ayant pour objet de la mettre en oeuvre. Cela a été jugé de manière générale pour les articles L. 121-1 et suivant du code de l’urbanisme (CE, 9 juillet 2021, n° 445118, Commune de Landéda) et de manière spécifique à l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme pour apprécier le caractère limité d’une extension de l’urbanisation (CE, 11 mars 2020, Confédération Environnement Méditerranée, req. n° 419861).

Pour le Conseil d’Etat, la cour avait méconnu ces principes. D’une part, elle n’avait pas tenu compte du SCOT qui retenait expressément Kerpape parmi les agglomérations et les villages existants, d’autre part, elle avait écarté les dispositions du SCOT relatives à l’extension de l’urbanisation dans les espaces proches du rivage estimant, à tort, que ces dernières étaient incompatibles avec les dispositions de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme. Le Conseil d’Etat avait donc annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes et lui avait renvoyé l’affaire (CE, 21 avril 2023, n° 456788).

A nouveau saisie, la cour administrative d’appel de Nantes relève que les parcelles qui constituent le terrain d’assiette du projet sont bordées à l’ouest par un important centre mutualiste de soins de suite et de réadaptation dénommé Kerpape, au nord par un foyer d’accueil médicalisé pour adultes handicapés, au nord-est par des bâtiments abritant un centre de vacances des armées, et à l’est, et partiellement au sud, par une quarantaine de maisons individuelles d’habitation et un centre nautique. Compte tenu de ces caractéristiques, la cour a alors estimé que le lieu-dit  » Kerpape  » présente un nombre et une densité suffisants de constructions pour qu’il puisse être regardé comme un village existant, notamment en tenant compte des dispositions du SCOT du Pays de Lorient.

Pour ce qui est de la méconnaissance de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme, la cour a jugé que le projet ne présentait pas une densité plus élevée que celle des espaces proches dans lesquels il s’insère. Dès lors, l’extension de l’urbanisation qui résulte de l’opération projetée doit être regardée comme présentant un caractère limité, notamment en tenant compte des dispositions du SCOT du Pays de Lorient (CAA Nantes, 26 mars 2024, n° 23NT01185).

Agglomération, villages et secteurs déjà urbanisés

Notion d’agglomération et de village – prise en compte du PADDUC – Le PADDUC précise les modalités d’application de la loi Littoral. Il dispose qu’une agglomération est identifiée selon des critères tenant au caractère permanent du lieu de vie qu’elle constitue, à l’importance et à la densité significative de l’espace considéré et à la fonction structurante qu’il joue à l’échelle de la microrégion ou de l’armature urbaine insulaire. Pour sa part, un village est identifié selon des critères tenant à la trame et la morphologie urbaine, aux indices de vie sociale dans l’espace considéré et au caractère stratégique de celui-ci pour l’organisation et le développement de la commune. Le PADDUC indique également pour qu’un espace soit constructible dans la bande littorale de cent mètres, la parcelle doit être incluse dans un espace urbanisé, lui-même contenu dans l’enveloppe urbaine d’un village ou d’une agglomération, elle doit être située en continuité immédiate avec des parcelles bâties, elle doit être de taille limitée, et ses caractéristiques topographiques ne doivent pas conduire à porter atteinte au paysage.

C’est dans ce contexte juridique que le maire de la commune de Grosseto-Prugna avait refusé un permis de construire pour une maison d’habitation avec piscine au lieu dit « Domaine de la pointe ».

Les parcelles cadastrées section A n° 2351 et 2352, lieudit  » Domaine de la Pointe « , à Porticcio (Image interactive Géoportail)

Pour l’application de ces dispositions, la Cour administrative d’appel de Marseille juge que si le « Domaine de la Pointe » comporte un nombre conséquent de maisons, il ne constitue pas un lieu de vie permanent qui permettrait de le qualifier d’agglomération. Il ne constitue pas non plus un village faute de comporter des commerces ou des édifices cultuels. Dès lors qu’il ne peut pas être qualifié d’agglomération ou de village, le secteur ne peut pas être qualifié d’espace urbanisé de la bande littorale de cent mètres puisque le PADDUC établit un lien entre ces notions (CAA Marseille, 12 mars 2024, 22MA02883).

Notion d’agglomération et de village – prise en compte du PADDUC – Le 5 septembre 2023, le maire de Coggia avait délivré un certificat indiquant au pétitionnaire qu’il était titulaire d’un permis de construire tacite depuis le 4 septembre 2023. Ce permis autorisait la construction d’une maison individuelle avec garage sur une parcelle E n° 1258 au lieu-dit Fontanese. Le préfet de la Corse-du-Sud avait demandé au Tribunal administratif de Bastia de suspendre l’exécution de cette décision. Cette requête ayant été rejetée, le préfet a fait appel devant la cour administrative d’appel de Marseille.

La parcelle E n° 1258 au lieu-dit Fontanese sur la commune de Coggia (image interactive Géoportail)

Pour la cour administrative d’appel de Marseille, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire tacite (CAA Marseille, 19 mars 2024, 24MA00465).

Prise en compte d’un camping – secteur déjà urbanisé – Par un arrêté du 19 septembre 2019, le maire d’Urrugne avait refusé un permis de construire une maison d’habitation sur un terrain situé 2005 route de la Glacière. Par un jugement du 28 décembre 2021, le Tribunal administratif de Pau avait rejeté la demande d’annulation de cette décision. Le pétitionnaire avait alors fait appel devant la cour administrative d’appel de Bordeaux.

Le terrain d’assiette du projet, à l’ouest de la route de la Glacière. Au nord, les deux maisons et le terrain de camping (photographie aérienne interactive Géoportail)

La cour considère que le camping ne peut pas être pris en compte pour qualifier ce secteur d’agglomération ou de village. La jurisprudence rappelle en effet que seules les constructions qui sont soumises à une autorisation d’urbanisme peuvent être prises en compte pour apprécier les critères du nombre et de la densité significatifs de constructions (CE, 11 juillet 2018, n° 410084, ministre Cohésion des territoires). Le Blog avait fait le point sur cette question. En l’espèce, le camping est composé de 80 emplacements comportant une cinquantaine de mobil-homes, d’un bâtiment d’accueil du public et deux piscines. Cependant, au regard de la nature, de la densité et du nombre de constructions et installations qu’il comporte, ce camping ne constitue pas une agglomération ou un village au sens des dispositions de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme. La Cour ajoute logiquement qu’il ne permet pas d’assurer la continuité avec la zone urbanisée située au nord et à l’ouest.

La cour précise également que le terrain ne fait pas partie d’un secteur déjà urbanisé. S’il se situe dans un compartiment comportant une soixantaine de constructions desservies par les réseaux, elles sont distribuées de façon éparse dans un rayon de 200 mètres environ, formant une zone peu dense (CAA Bordeaux, 19 mars 2024, n° 22BX00714).

Continuité avec une agglomération ou un village – Par un arrêté du 20 août 2019, le maire de Roquebrunes-sur-Argens avait refusé un permis de construire une villa sur la parcelle AM 69 au lieu-dit Les Petugons. En première instance, le tribunal administratif de Toulon avait rejeté la demande d’annulation du pétitionnaire.

La parcelle AM n° 69 au lieu dit Les Petugons sur la commune de Roquebrune-sur-Argens

Pour la cour administrative d’appel de Marseille, le terrain d’assiette du projet, situé au lieudit Les Petugons, est distant d’une centaine de mètres d’un lotissement, dont il est séparé par le boulevard des Arbousiers qui constitue une coupure d’urbanisation. Le projet litigieux n’est donc pas situé dans sa continuité. La cour ajoute que les parcelles situées à l’est, à l’ouest et au sud du terrain d’assiette du projet comportent des maisons pavillonnaires de manière diffuse, disséminées dans un environnement naturel et boisé, qui débouchent, à l’est, sur un vaste secteur naturel et dépourvu de toute construction. Dans ces conditions, le nombre et la densité des constructions sont insuffisants pour qualifier le secteur d’agglomération ou de village au sens de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme (CAA Marseille, 21 mars 2024, n° 22MA02850).

Espaces proches du rivage

Par un arrêté du 11 mai 2021, le maire de Sainte-Maxime avait retiré le permis de construire tacite qu’il avait délivré pour un projet de 18 logements sociaux et 50 logements individuels sur des parcelles cadastrées section AH nos 172, 540, 933 et 936, sises 18 bis avenue Girard. L’arrêt rendu le 21 mars 2024 par la cour administrative d’appel de Marseille est intéressant car il analyse point par point le respect des dispositions de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme en vérifiant tout d’abord si le terrain d’assiette du projet est situé en espace proche du rivage. Il contrôle ensuite si le projet entraîne une extension de l’urbanisation et si celle-ci présente un caractère limité. Enfin, il s’assure de la conformité du projet au SCOT ou de sa justification par le PLU. Le Blog avait eu l’occasion de rappeler cette méthode d’analyse à propos d’un arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Lyon.

Première étape : la notion d’espace proche du rivage – Le Conseil d’État a rappelé que pour déterminer si une zone peut être qualifiée d’espace proche du rivage, trois critères doivent être pris en compte : la distance séparant cette zone du rivage, son caractère urbanisé ou non et la co-visibilité entre cette zone et le plan d’eau (CE, 3 juin 2009, n° 310587, Commune de Rognac). Conformément aux principe dégagés par cet arrêt, la cour administrative d’appel de Marseille juge qu’un terrain qui se situe à environ 240 mètres du rivage, duquel il est visible, et dont il n’est séparé, malgré le caractère urbanisé du secteur, par aucune ligne de crête se situe dans un espace proche du rivage (CAA Marseille, 21 mars 2024, n° 22MA01857).

Le terrain d’assiette du projet (avec le repère bleu) sur la commune de Sainte-Maxime (source Google Earth)

Deuxième étape : la notion d’extension de l’urbanisation – La jurisprudence a précisé les modalités d’application de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme dans les espaces urbanisés. Le Conseil d’Etat a jugé qu’une opération qu’il est projeté de réaliser en agglomération ou, de manière générale, dans des espaces déjà urbanisés, ne peut être regardée comme une extension de l’urbanisation au sens de l’article L.121-13 du Code de l’urbanisme que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l’urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d’un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions. La décision ajoute que la seule réalisation dans un quartier urbain d’un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction, ne peut être regardée comme constituant une extension de l’urbanisation au sens de la loi (CE, 7 février 2005, n° 264315, Société Soleil d’or et Commune de Menton). Le principe a été rappelé en 2007 par le Conseil d’État qui a jugé qu’il appartient à l’autorité administrative, sous le contrôle du juge, d’examiner si le projet qui lui est soumis, élargit le périmètre urbanisé ou conduit à une densification sensible des constructions (CE, 12 mars 2007, n° 280326, Commune de Lancieux). Dans ce dernier arrêt, le Conseil d’État précise qu’il faut tenir compte de l’ensemble des caractéristiques du quartier et pas seulement de celles du compartiment de terrain dans lequel le projet se situe.

Pour l’application de ce principe, la cour administrative d’appel de Marseille juge qu’un projet de 68 logements répartis en 5 groupes de bâtiments qui est entouré au nord, au sud, à l’est et l’ouest de zones pavillonnaires entraîne une extension de l’urbanisation (CAA Marseille, 21 mars 2024, n° 22MA01857).

Les parcelles AH 172, 540, 933 et 936 sur la commune de Sainte-Maxime

Troisième étape : la notion d’extension limitée – La méthode d’appréciation du caractère limité d’une extension de l’urbanisation est résumée par le Conseil d’État dans la formule suivante « le caractère limité de l’urbanisation (…) s’apprécie compte tenu de l’implantation, de l’importance, de la densité et de la destination des constructions envisagées » (CE, 2 octobre 2006, n° 271327, Société Marcellesi). La cour administrative d’appel de Marseille juge donc que si le projet entraîne une extension de l’urbanisation, elle doit être regardée comme limitée. La cour relève que le projet est implanté en continuité d’un secteur urbanisé et qu’il présente une densité relativement faible puisque la surface totale de plancher reste inférieure à 25 % de la superficie totale de l’unité foncière du projet. Par suite, eu égard au caractère raisonnable de ses dimensions et de sa densité, il doit être regardé comme n’emportant qu’une extension limitée de l’urbanisation au sens des dispositions précitées de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme (CAA Marseille, 21 mars 2024, n° 22MA01857). 

Quatrième étape : la justification par le PLU, conformité au SCOT  ou l’accord du préfet – L’article L. 121-13 du Code de l’urbanisme distingue trois cas de figure :

  • L’urbanisation est motivée et justifiée par le plan local d’urbanisme selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l’accueil d’activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau ;
  • L’urbanisation est conforme aux dispositions d’un schéma de cohérence territoriale ou d’un schéma d’aménagement régional ou compatible avec celles d’un schéma de mise en valeur de la mer ;
  • L’urbanisation est autorisée par le préfet après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites.

La jurisprudence rappelle de manière constante que ces trois modalités sont exclusives les unes des autres. L’extension de l’urbanisation est possible dès lors que l’une des conditions est remplie (CAA Marseille, 9 avril 2018, n° 16MA02373).

Dans l’affaire de la commune de Sainte Maxime, la cour relève que le SCoT des cantons de Grimaud et Saint-Tropez ne comporte pas de dispositions suffisamment précises relatives aux conditions d’extension de l’urbanisation dans les espaces proches du rivage dans lesquels l’opération est envisagée. L’extension de l’urbanisation dans les espaces proches du rivage n’est par ailleurs pas justifiée et motivée par le plan local d’urbanisme de la commune de Sainte-Maxime, qui ne comporte que des considérations très générales à cet égard. Faute d’avoir obtenu l’accord  du préfet, cette extension de l’urbanisation méconnaît donc l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme.

Notion d’extension limitée de l’urbanisation – prise en compte du PADDUC – Aux termes de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme :  » L’extension limitée de l’urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d’eau intérieurs désignés au 1° de l’article L. 321-2 du code de l’environnement est justifiée et motivée dans le plan local d’urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l’accueil d’activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau. / Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l’urbanisation est conforme aux dispositions d’un schéma de cohérence territoriale ou d’un schéma d’aménagement régional ou compatible avec celles d’un schéma de mise en valeur de la mer (…) « . Le PADDUC précise les modalités d’application de ces dispositions en indiquant que le caractère limité de l’extension doit être déterminé en mobilisant des critères liés à l’importance du projet par rapport à l’urbanisation environnante, à son implantation par rapport à cette urbanisation et au rivage, et aux caractéristiques et fonctions du bâti ainsi que son intégration dans les sites et paysages. Ce document joue un rôle essentiel dans la mise en oeuvre de la loi Littoral puisque dès lors qu’il comporte des dispositions suffisamment précises, la loi Littoral doit être appliquée à travers les précisions en question tant vis-à-vis des documents d’urbanisme de rang inférieur que des décisions liées à l’usage du sol. La jurisprudence a toutefois précisé que ce rôle de prisme ne pouvait jouer qu’à la condition que les dispositions qui mettent en oeuvre la loi Littoral soient à fois suffisamment précises et compatibles avec la loi (CE, 16 juillet 2010, ministre de l’Écologie du Développement et de l’aménagement Durables, req. n° 313768). Le Blog avait fait le point sur ce dispositif. C’est dans ce contexte que la Cour administrative d’appel de Marseille était saisie de la légalité du refus de permis de construire opposé par le maire de Grosso-Prugna à un projet de dix-huit logements collectifs sur une parcelle cadastrée section A n° 3623, située au lieudit « Forcoli ».

La parcelle A 3623 au lieu-dit « Forcoli » sur la commune de Grosso-Prugna (image interactive Géoportail)

Pour la Cour, ce projet important qui comporte trois bâtiments de 954 m2 de surface de plancher pour dix-huit logements collectifs diffère de l’urbanisation environnante. Il a par ailleurs un impact sur le caractère essentiellement naturel du site d’implantation malgré sa conception en deux niveaux au plus. Il entraîne donc une extension de l’urbanisation qui n’est pas limitée au sens de l’article L. 121-13 tel que précisé par le PADDUC (CAA Marseille, 12 mars 2024, 23MA00155).

Espaces remarquables et caractéristiques

Notion d’aménagement léger – réfection d’une construction existante – Dans les espaces remarquables protégés par les articles L. 121-23 et L. 121-24 du code de l’urbanisme, seuls des aménagements légers définis par l’article R. 121-5 du même code sont autorisés. Les règles applicables aux constructions à usage d’habitation sont très strictes puisque les constructions nouvelles ou l’extension des constructions est interdite. Seule la réfection des constructions existantes est autorisée par le 3° de l’article R. 121-5. Dans une affaire jugée en 2022, la Cour administrative d’appel de Marseille avait jugé que la réalisation d’un local technique, d’une terrasse ainsi que la modification des ouvertures d’une façade ne constituaient pas des travaux de réfection d’un bâtiment existant. En revanche, la Cour avait estimé que le remplacement des menuiseries et une reprise en peinture pouvaient être regardés comme des travaux de réfection d’un bâtiment existant au sens de l’article R. 121-5 du code de l’urbanisme » (CAA Marseille, 29 mars 2022, n° 20MA00338).

La Cour administrative d’appel de Bordeaux était saisie de la légalité de la décision du maire de Sainte-Marie-de-Ré s’opposant a des travaux sur une maison d’habitation existante. La déclaration portait sur la mise en place d’un assainissement individuel, sur la régularisation d’une verrière érigée en remplacement d’une verrière existante et sur la pose d’une terrasse en bois en remplacement d’une terrasse déjà existante.

Les parcelles AN 249, 263, 264 et 265 sur la commune de Sainte-Marie-de-Ré (carte interactive Géoportail)

Pour la Cour, la pose de la terrasse et de la verrière ne sont pas des aménagements légers. Elle relève que la terrasse est plus vaste que le revêtement en pierre qu’elle remplace. Quand à la verrière dont la régularisation est demandée, il apparît qu’elle est plus grande, qu’elle est réalisée dans des matériaux différents et qu’elle n’est pas de la même couleur que celle qui précédait. Les travaux ne sont donc pas des aménagements légers. La Cour ne se prononce pas expressément sur la question de l’assainissement individuel. On peut toutefois penser qu’un tel équipement qui vient en remplacement d’une installation défaillante voire inexistante relève bien de la réfection d’une construction (CAA Bordeaux, 5 mars 2024, n° 21BX04524).

Espaces boisés significatifs

Notion d’espace boisé significatif – Aux termes de l’article L. 121-27 du Code de l’urbanisme, le plan local d’urbanisme doit classer en espaces boisés au titre de l’article L. 113-1 du même code les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après consultation de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Le caractère significatif peut-être apprécié par le Conseil d’État en comparant le boisement en cause avec ceux existants sur la commune (CE, 15 octobre 2001, n° 219883, Sevet)

La cour administrative d’appel de Nantes juge qu’une parcelle qui se situe en continuité avec d’autres parcelles classées en zone N par le PLU et qui constituent un espace boisé protégé homogène d’une superficie significative aux abords immédiats de zones urbaines doit être protégé au titre de l’article L. 121-27 du code de l’urbanisme (CAA Nantes, 26 mars 2024, 22NT00457).

Les parcelles AL n° 584, 590 et 587 au lieu-dit Côte de Trompe Souris sur la commune de Binic-Etables-sur-Mer

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